1890
Mars↑
Augustin Filon, « Courrier
littéraire », Annales
politiques et littéraires, 1er mars 1890, p. 283-286.
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J’ai lu récemment, dans une préface d’Édouard Rod, qu’il n’y avait plus d’écoles en littérature. En effet, la forme sous laquelle nous vivons actuellement, nous autres républicains de la république des lettres, est l’anarchie pure et simple. Mais s’il n’y a plus d’écoles, il y a encore des coteries et des bandes. Les coteries se sont appelées bureaux d’esprit au xvme siècle, cénacles au xixe. Peut-être ont-elles aujourd’hui un autre nom, plus particulier, que je ne connais pas, parce que je ne suis pas dans le train. Les bandes se retranchent dans des brasseries, dans un Rat-mort quelconque. Les coteries siègent dans des salons et les femmes s’en mêlent. On boit avec les premières, on mange avec les secondes. Dans les unes et dans les autres, on pouline et on pontifie. Poliner, pontifier, toute la vie moderne!
Les coteries et les bandes sont aux écoles ce que les groupes parlementaires sont aux partis politiques. Par là, jugez-les!
Les deux bandes qui se disputent le roman français, devenu notre seule branche de littérature, sont les réalistes et les psychologues, ou, si vous l’aimez mieux, le naturalisme ou l’intuitivisme (il n’y a rien de changé en France, il n’y a qu’un barbarie de plus). L’tintaicivisme consiste à regarder en soi pour y voir les autres. C’est ainsi que le maître à danser de Musset dit à son élève, dans // ne faut jurer de rien : « Vous allez à droite, vous regardez à gauche; vous alla*-A gauche {284} Zi vous regardez à droite. Qu’y a-t-il de plus simple ? » Avec les intuitifs, « pas de faits trop concrets, pas de figures trop précises »; ni description, ni « scènes », ni récits rétrospectifs : rien que l’évolution de l’âme dans le vide, ou, mieux encore, le retour aux symboles. Le naturalisme, vous le connaissez : voici tantôt vingt ans qu’il trône. Il est l’indigestion de réalité matérielle, comme l’intuitivisme est le jeûne, l’inanition, le système des Tanner, des Succi et des Merlatti appliqué à la littérature des romans. Maintenant, bon public, dis-nous ce que tu préfères. Veux-tu être noyé dans la fosse au purin, ou asphyxié sous la cloche de la machine pneumatique?— Mais je ne veux ni l’un ni l’autre! — Bon public, tu changes la question... — Non, non, qu’on me ramène à Georges Ohnet! Vive Serge Panine! Vive le Maître de Forges! Foin de la littérature!
Tout cela pour arriver à vous dire que M. Jean Richepin a fait un rêve. Pourquoi serait-on poète, si ce n’est pour faire des rêves? Être à la fois l’émule de Bourget et le Dauphin de Zola, marier la république de Venise et le Grand-Turc, et les marier si bien qu’ils soient heureux et qu’ils aient beaucoup d’enfants — format Charpentier — en un mot, fonder la psychologie naturaliste qui regardera « en dedans » suivant la prescription nouvelle, mais pour y étudier l’âme inférieure, le ventre, au lieu de la tête et du cœur : voilà, si je comprends le Cadet (mais je n’en suis pas sûr!) ce que M. Richepin a voulu en écrivant ce livre (1). Au naturalisme, il a pris les descriptions violentes et les gros mots; à la secte psychologique, le dogme d’après lequel chacun de nous, au lieu d’être « lui », est « plusieurs ». Il a emprunté tour à tour leur méthode aux uns et aux autres.
Amable Baudoin de Toraval descend d’une famille de hobereaux de la Thiérache. Son père, soldat d’aventure, a, par inconstance et par indiscipline, manqué dix fois sa vie. Cependant, vers la fin du voyage, il a jeté l’ancre en épousant la meunière dü Moulin-Joli. De ce mariage, deux fils, qui reproduisent les traits et les instincts des deux races différentes. Désiré, le meunier, est âpre au travail, dur à la peine, passionné pour l’argent, lourd de sentiments, grossier de paroles; un honnête butor qu’il est difficile d’aimer, mais que nous estimerions, si l’auteur nous le permettait, malgré ses petites ses et ses lâchetés, cause d’un fonds de bonté native et de cet esprit de sacrifice, si étrangement allié avec l’esprit de tracasserie et de domination. Amable, lui, aime à la fois l’oisiveté et les émotions nerveuses. Il va à Paris, s’essaye à la politique, à Part, à la littérature; ne réussit qu'à manger sa fortune jusqu’au dernier sou et au delà. Nous le voyons, au début du récit, revenir au gîte, mendiant hâve, éreinté, ombrageux. En somme, c’est un rate, un inutile, qui n’a de l’a-
(1) Le Cadet, par. Jean Richepin. —Charpentier.
liste que les sensations excessives, non la faculté productrice. Désiré l’accueille à bras ouverts, mais, dès les premiers mois, lui meurtrit l’âme de sa brutale générosité de paysan. On voit naître une jalousie dont l’auteur va étudier les progrès, contrariés par des sautes d’humeur, des attendrissements inattendus et presque incompréhensibles, des saillies de bonté, des « maladies de vertu », comme dit le Borgnot, ce vaurien errant qui devient le mauvais génie d’Amable. Ce Borgnot est peint avec une vigueur, une furie, un emportement et une surabondance d’imagination qu’aucun romancier de notre temps, y compris Zola et Daudet, ne pourraient dépasser. Il faut rendre à César ce qui est à César, et à Richepin ce qui est à Richepin. Depuis Callot et Burns,personne n’a compris le gueux comme lui, âme et corps, pensée, langue, guenilles. 11 est maître dans Part de le poser, de le faire vivre et parler. Les entrées et les sorties du Borgnot sont des merveilles de mise en scène et de savoir-faire artistique.
Donc ce Borgnot, cette sauterelle vivante, cet estropié qui bondit de buisson en buisson sans qu’on l’entende venir, véritable incarnation de la Mauvaise Pensée, couve tendrement, avec des précautions maternelles, le sentiment effroyable qui grandit dans Pâme d’Amable. Dès le premier jour, il a en vue le dernier terme, le fratricide, et l’a montré aux regards épouvantés du jeune homme. Il a longtemps caressé une vengeance, lui aussi ; il a versé le sang d’un ennemi, il sait comme c’est bon et s’en pourlécher, après vingt ans et plus :
— Moi, dit-il, couchant en joue une victime imaginaire, moi je n’ai pas manqué mon gabelou !
Le professeur de crime ne réussit pas tout d’abord avec son élève. Cet Amable Baudoin ne se croit pas, ne se sait pas mauvais. Mais comment l’homme serait-il bon chez M. Richepin ? Sauvage, c’est une bête féroce; civilisé, un « pourri ». Or, Amable est une combinaison des deux. Lorsque l’auteur nous le montre aimant, puis haïssant son frère, tout ce que je puis admettre, c’est qu’il essaye de l’aimer et s’efforce de ne point le haïr. L’amour de la Terre, qui n’avait guère tourmenté la jeunesse d’Amable, l’envahit peu à peu, et ses nerfs d’artiste lui font ressentir cette passion nouvelle avec une fougue et un emportement maladifs. Il s’indigne qu’on la fasse travailler, car il ne la convoite pas comme un bien matériel, mais comme un être vivant. Il se roule sur son sein qu’il mouille de ses pleurs et échauffe de ses désirs. Il la veut pour maîtresse et non pour servante.
Par une série de sophistes qui sont, j’en conviens, très serrés, il en est venu à se convaincre que son frère l’a spolié de cette terre bien-aimée. Or Désiré a fait tout le contraire : à force de travail, de privations, d’avarice, il a racheté les biens vendus par Amable et reconstitué le domaine. Le bonheur, pour lui, c’est d’en {285} jouir avec son frère dans une communauté indécise.' Au dernier vivant, la propriété totale. Mais, après eux? C’est ici qu’Amable se préoccupe d’avoir un héritier, afin que cette chère, cette bonne terre n’aille point à des étrangers, qui la diviseraient, la dénatureraient pour l’exploiter, l’exténueraient pour lui faire suer plus d’argent.
Puisque Désiré ne paraît pas songer au mariage, pourquoi Amable n’y songe-t-il pas pour lui-même? C’est l’idée qui viendrait à tout homme dans sa situa lion. M. Richepin l’écarte par la simple et impérative raison que, si Amable faisait une chose aussi naturelle, il ne serait pas l’être détraqué et compliqué qu’il doit être, et le roman n'existerait plus. Donc, c’est Désiré que l’on marie. Mais il ne sait pas être père : ce petit mot que je suis dans l’obligation de souligner, malgré mon profond respect pour mes lectrices, résume cinquante ou soixante pages du roman. Amable sent qu un « devoir » s’impose à lui : prendre de force sa bellesœur et empêcher que la terre, la terre chérie, etc. (revoir pour les épithètes la colonne précédente), ne passe à des collatéraux. Je ne vous raconterai pas où ni comment Amable accomplit son « devoir », après avoir hypnotisé la pauvre Anais. Alors seulement il s’aperçoit qu'il en était amoureux, dans le sens naturaliste, zoélaïque mot. Ces relations adultères et incestueuses se prolongent, s’arrêtent, se reprennent, pendant plusieurs années; elles sont interrompues tantôt par les remords religieux d’Anaïs, tantôt par un goût soudain qui lui prend pour son mari. Ce qui caractérise celle analyse, outre la crudité croissante des situations et du langage, ce sont les variations inouïes des caractères et des tempéraments. Cet abominable Borgnot est dévoué comme un chien à « M’sieu Amable ». Désiré, l’excellent homme, est brutal et méchant avec sa femme lorsqu’il la croit stérile. Anais est dévote et lascive; elle adore successivement son mari et son beaufrère Sa volonté brille et s’éclipse comme le feu tournant" d’un phare. On a déjà vu les contradictions d’Amable. M. Richepin donne, j’en ai peur, une amplitude exagérée aux oscillations d’une âme humaine. Qu’elle balance entre le bien elle mal, soit; qu’elle aille de la sainteté au crime, non.
Amable fait plus que bravement son devoir pendant la campagne de 1870, et c’est à mon avis une énorme faute que d’avoir fait passer dans celle vilaine âme, souillée et malade, les douleurs de la patrie vaincue sans qu’elles la relèvent et la purifient. Le crime devant lequel reculait le raté, l’pôle somnolent et voluptueux du Moulin-Joli, c’est l’héroïque franc-tireur des Ardennes qui le commettra. Caché derrière un buisson, Amable frappe son frère d’une balle mortelle au front en criant: « Lapin! lapin ! » Il a, par une machination atroce, tout arrangé pour que le Borgnot, seul, puisse être soupçonné. En effet, le malheureux est condamné et guillotiné.
Voilà donc deux meurtres sur la conscience d’Amable Baudoin, s’il en avait une. Meurtres inutiles, puisqu’il ne jouira ni d’Anaïs, qui s’est retirée chez les béguines, ni de la terre qu’il laisse en friche. 11 est arrivé à se persuader qu’il a « bien fait », et sa seule occupation consiste à s’admirer, à se glorifier de son crime. Ce crime, auquel personne ne voulait croire au moment du procès, tout le monde y croit maintenant, sans que M. Richepin se donne la peine de nous expliquer ce revirement. Une contradiction de plus ou de moins! On montre Amable au doigt, on crie sous ses fenêtres: « Assassin ! assassin ! » Il en est enchanté, et satiriste quand la colère publique, niaisement assouvie par ces vains cris, cesse de le poursuivre. Il a pour confidente une vieille servante qui l’a compris à demi-mot, ayant autrefois surpris lesecrelde ses amours: elle le devine, l’excuse, l’approuve, et celte approbation tacite suffit au bonheur d’Amable. La décrépitude atteint celte femme, l’imbécillité l’envahit; dans ses prunelles froides et vagues, l’assassin cherche encore le reflet de son glorieux crime, et quand la vieille meurt, il se sent comme seul dans la nuit. Il se relire alors dans une masure solitaire, y achève sa vie comme un loupgarou, et meurt d’une mort mystérieuse et dégoûtante, dont l’horreur salirait ces pages.
J’ai insisté sur ce roman, non qu’il me plaise, mais à cause du bruit qu’il fait, non pour le faire lire, mais pour en donner une idée à ceux qui ne veulent pas le lire et ont bien raison. J’ai conscience d’avoir été presque impartial. A quoi serviraient ici de grandes phrases? La morale de M. Richepin n’est pas la mienne, et j’espère qu’elle n’est point la vôtre. Peut-être s est-il proposé simplement d’étudier un monstre, d écrire l’histoire d’une maladie mentale. Je donnerais volontiers à l’auteur le bénéfice de cette explication, si les autres personnages dont Amable est entoure n étaient presque aussi malades et presque aussi monstrueux que lui. Désiré, l’être normal et sain, est une brute. La vertu est représentée par deux vieilles filles idiotes et par un prêtre sans clairvoyance,qui ne fait que lâcher des sottises et des hérésies. On voudrait oublier le Richepin des Blasphémés, mais le Richepin des Blasphèmes n'entend pas être oublié. Il se rappelle à notre mauvais souvenir par quelques grosses impiétés, bien scandaleuses et bien ordurières, qui feront le plus grand plaisir aux amateurs et dont quelques chrétiens auront la simplicité de s’affliger. Mais les chrétiens qui lisent le Cadet n’auront que ce qu’ils méritent. Il ne faut pas espérer que M. Richepin laisse jamais la religion tranquille. Une loi pathologique l’obligea rôder autour de l’Église, haineux et inquiet, comme elle ramène les escarpes auprès de la maison où ils ont assassiné.
11 serait souverainement injuste de ne pas ajouter que ce livre renferme d’agréables croquis de la Thierauche. Par malheur, jamais paysage décrit n’a eu la moindre clarté pour moi; jamais écrivain n’a réussi à {286} me faire voir un arbre ou une pierre. Ce qui est hors ligne, dans son genre, avec les deux figures du Borgnot et de la vieille servante, ce sont les bouts de dialogue thiérachois dont M. Richepin nous a régalés. Régalés est le mot, car il n’y a rien de plus savoureux. C’est à nous faire croire qu’il y a dans chaque paysan de la Thiérache un Rabelais qui s’ignore. Je viens de feuilleter le volume à votre intention,cherchant un échantillon à peu près décent. Je n’en ai pas trouvé. Nous sommes trop « bleue » pour citer ici de pareilles choses : cela ternirait notre azur. C'est dommage, et je reconnais franchement l’amusement que m’ont donné ces gaudrioles endiablées, moitié patois, moitié vieux français suranné, toutes pétillantes de gauloiserie populaire et vraiment inappréciables pour des philologies. Un temps viendra où ils seront seuls à lire M. Richepin.
* * Voulez-vous changer de note? Vous plaît-il d’entendre de nouveau la voix de cette conscience qu’on méconnaissait, qu’on étranglait tout à l’heure? Lisez Comme dans la vie, par Albert Delpit (1).
Roland Montfranchet, licencié ès lettres et bachelier ès sciences, ruiné par la faillite et le suicide de son père, commet un homicide involontaire et s’approprie une grosse somme d’argent, dans des circonstances si bizarrement combinées qu’au sortir de cette double aventure il est considéré comme un héros. Quelques années après, devenu une des puissances financières de Paris, il rencontre la fille de sa victime, l’aime, s’en fait aimer et l’épouse. La ressemblance de la fille qu’il adore avec la mère dont il voudrait bannir le souvenir fait son supplice. A cette torture se joint la crainte d’être dénoncé ou assassiné par l’homme qui a été condamné à sa place et qui le suit pas à pas pour se venger. C’est alors qu’il devient meurtrier une seconde fois, afin de supprimer son ennemi. Comme le premier, ce crime sera ignoré de la justice, mais la sœur de Roland, Alice, une noble et vertueuse femme qui n’a jamais connu ni tentation ni défaillance, est maîtresse de son secret, ^coûtez de quel accent elle lui parle :
« Tu ne crois pas en Dieu? Mais Dieu lui-même te force à croire en lui... Il te guettait! Il a mis Florence sur ta route... Comment ne t’es-tu pas dit qu’il était bien étrange que tu rencontrasses la fille de ta victime? Dans l’univers, il y a tant de femmes dont tu pouvais t’éprendre, auxquelles tu pouvais donner ton nom ! Il a fallu que ce fût celle-là que tu choisisses, ne sachant rien de sa famille, de son passé. Et l’amour t’a saisi, et tu as accoré cette créature inconnue, ne voyant ton avenir qu’en elle, par elle, pour elle. Ah! oui, le hasard!... C’est le nom que vous donnez à la Providence, vous autres! Réfléchis et juge. Celte Providence, que tu nies, t’a fait rencontrer Florence, car Dieu vous-
(1) Comme dans la vie, par Albert Delpit. — Ollendorff.
lait que tu fusses toi-même l’artisan de ta punition. » Tout cela est juste, éloquent, passionné et, en même temps, fort habile; car si l’on était tenté de trouver des invraisemblables un peu trop fortes dans ce récit, l’auteur les met adroitement sur le compte de la Providence et ferme ainsi la bouche au critique. Oui, c’est vrai : qu’on y voie le fonctionnement d’une loi nécessaire ou l’exécution d’un décret providentiel, la vie, la vie réelle, semble parfois l’œuvre du plus osé, du plus fantasque des dramaturges.
Quoi qu’il en soit, je suis heureux de savoir que cette vieille, cette éternelle morale a du succès auprès du public. J’aime à penser qu’elle contribue à la popularité de Delpit autant que sa riche imagination, sa narration ardente et rapide, ce don d’émotion qui ne le quitte pas. Passionnément a eu plus de quarante éditions : j’en souhaite plus encore à Comme dans la vie.
Augustin Filon.
André Maurel, « Une
souscription », Annales
politiques et littéraires, 1er mars 1890, p. 286-287.
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Ce n’est pas la première fois que M. Paul Verlaine entre à l’hôpital, et ce n’est pas non plus la première fois que ses amis se cotisent pour lui fournir les moyens, sinon de sortir de la maison de santé, car on en sort toujours, du moins de ne pas échouer à l’asile de nuit, une fois la porte de Bichat franchie.
Mais c’est peut-être la première fois qu’un appel public est fait à tous les lettrés en faveur du poète saturnien, de celui que toute notre génération admire et pour lequel, entre vingt autres, elle a un culte passionné, contrairement à ce que disait l’autre jour un de nos aînés, qui nous reprochait de ne pas avoir le respect et l’adoration des gloires littéraires.
M. Léon Deschamps reçoit depuis quinze jours les adhésions de tous ceux qui ont vingt ans et croient à l’art moderne, et, à en juger par le nombre des souscripteurs, le reproche qui était fait dernièrement par un critique ordinairement plus indulgent et moins passionné n’a pas toute la vigueur de la justice et de la vérité. A peine, en effet, avait-on fait savoir dans les journaux que M. Deschamps recevait des souscriptions de 3, 5 et 20 francs pour un volume de Paul Verlaine, à peine la jeunesse littéraire sut-elle qu’elle avait là l’occasion de montrer combien elle aimait — et cela sans tapage — son maître vénéré, que les lettres affluèrent, 30, boulevard Arago. Si c’est là dédain des ancêtres et respect du talent, où donc trouverons-nous l’hommage et la déférence ?
Et puisque l’occasion m’en est offerte à propos de cette souscription, je vais essayer d’établir nettement les rapports du poète de Sagesse avec ceux, jeunes et vieux, qui ont vécu et vivent avec lui en ces dernières années.
Il est fort possible et même fort probable — pour ne pas dire certain — que la génération qui précède la nôtre, c’est-à-dire celle des hommes de trente-cinq à cinquante ans, ait {287} pour M. Verlaine le plus profond respect et la plus grande admiration. Mais à part un ou deux des maîtres — tout au moins des « installés » — de notre époque, il n’en est guère qui aient fait preuve publique de leur vénération pour le « pauvre Lélian ».
Même parmi ses plus contemporains, ceux qui fréquentèrent avec lui les cénacles du Parnasse, bien peu se plurent à reconnaître en lui leur maître. Où sont les hommages, le pieux agenouillent intellectuel des pannassions qui furent ses amis et ses compagnons ? Seul peut-être parmi ceux-ci M. Anatole France proclame aujourd’hui la grandeur de Paul Verlaine, qui, l’autre jour encore, lançait un si beau cri d’amour, si tendre et si touchant, vers son ami, parce que, lui aussi, est de ceux qui s’attendrissent aux émotions et aux idées des hommes. Les autres suivirent la fortune de MM. Coppée et Mendès et, à la faveur des quinze années d’absence de leur frère de lettres, l’oublièrent.
Lorsque le poète de Jadis et Naguère reparut, publiant des vers qui effarèrent ceux qui le croyaient resté à la poétique des Poèmes saturniens et de la Bonne Chanson, lorsque Paul Verlaine donna Sagesse et Parallèlement, l’oubli s’accentua... Et plus jamais on ne parla de Paul Verlaine que comme d’une pauvre âme de poète ayant donné des espérances, mais que la vie avait brisée. Verlaine devenait un souvenir tendre pour ses contemporains, il n’était plus un maître.
Pouvait-il l’être, en effet ? Devenu poète ému et sensitif, n’étant plus le parnasses d’autrefois, mais un maître vraiment moderne, un poète idéaliste et mystique, naïf et tendre, bref abjurant tout son passé d’impassible pour être la voix rythmée qui exprimait le tourment et la joie des âmes vibrantes et troublées, pouvait-il rester ami aux parnassiens ? Seul, M. Anatole France se souvint de son compagnon, et Verlaine eût peut-être été oublié, ou presque, si son état d’âme n’était venu justement correspondre, en précurseur, au mouvement littéraire qui s’affirme aujourd'hui.
De tous nos poètes, en effet, M. Paul Verlaine est celui dont l’âme correspond le plus à l’âme littéraire moderne. Le respect de la forme, hérité des Goncourt en particulier, le fait bien davantage le poète des psychologues que M. Sully Prudhomme, dont la philosophie nous satisfait cependant si complètement. Parcourez ses derniers volumes : Sagesse, Parallèlement, Amour, et ce Bonheur dont nous connaissons déjà des fragments, vous y trouverez cette sincérité d’accent, cette complaisance à l’analyse intime, cet amour du détail idéaliste, ces inquiétudes et ces tressaillements qui sont le résultat d’un cœur tourmenté, soumis à toutes les inflexions d’idées, ce dilettantisme, ce vague dans l’opinion, cet échappement continuel de la certitude qui ne permet pas l’affirmation, cette acuité nerveuse dans la sensation, ce mysticisme rayonnant, cette mélancolie douce —- si douce qu’elle sourit souvent — toutes ces qualités qui sont la marque de Paul Verlaine. Elles sont aussi celle de la génération qui grandit... Qualités ?... Défauts ?...
« Laisse, laisse, ô mon âme, flotter l’image, » dit Amaury dans Volupté. Et Verlaine, avec les modernes, laisse flotter l’image, car tout n’est qu’imagé, que rêve berceur de la vie, que flottante illusion.
Je ne sais si M. Verlaine, dans son lit de Bichat, parcourt les quelques opuscules ou revues où la jeunesse littéraire lui rend ses devoirs. Peut-être ses habitudes extérieures n’ont-elles pas changé avec son âme et s’en tient-il encore, pour ses lectures, aux brochures d’autrefois. Qu’importe ! S’il n’a pas la consolation de se voir universellement admiré par la foule des jeunes qu’il ne connaît pas, ceux-ci ont du moins la joie et l’orgueil légitime de se réclamer de leur père vénéré. Il n’est pas, je crois, un seul des jeunes hommes de lettres qui ne lui ait rendu ses devoirs avec piété ; je ne citerai, pour mémoire, que la belle étude de Jules Tellier, dans laquelle se résument les sentiments de tous ceux qui vibrèrent avec lui... Dans l’avenir, lorsque les historiens classeront les imaginatifs, Verlaine sera placé en tête du mouvement actuel. Et l’on dira alors qu’ils furent bien partagés ceux qui mirent en lui leur foi, et que peut-être, dans le Parnasse, Paul Verlaine eut la meilleure part, parce qu’il sut — comme le fit d’ailleurs aussi M. Anatole France descendre de sa colonne de jaspe pour se mouler à la vie, aimer, se réjouir et souffrir.
Que les modernes laissent donc passer les amertumes des aînés. Ils ont pour eux le plus bel apanage, qu’on leur envie : la jeunesse. Et quoi qu’on dise, ils ont toujours l’amour du beau. Peut-on réellement leur reprocher de préférer, parmi leurs maîtres, ceux qui répondent plus exactement à leurs goûts ? Le succès de la souscription est là pour prouver que l’on sait encore aujourd’hui être enthousiaste et naïf.
André Maurel.
Juin↑
Georges Bonnamour, « Jean
Richepin », La Plume,
1er juin 1890,
p. 91-92.
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À l’heure où j'estropiais timidement les mètres sur les bancs du collège, M. Jean Richepin soulevait dans la Presse d'inoubliables polémiques avec ses Blasphèmes. Ce fut alors une joie pour quelques-uns de mon âge et moi-même d’apprendre, au hasard des journaux qui nous parvenaient, qu’un poète, en France, osait défier l’opinion, n'opposant que la sérénité de son indifférence aux clameurs des imbéciles.
Je ne dirai donc rien de la vie de M Richepin. Il n’est, à l'heure où j’écris ces lignes, pas un apprenti de lettres qui ne connaisse dans tous ses détails, grâce aux indications des reporters, depuis M. Wolff jusqu’à M. Champsaur, cette aventureuse et libre existence.
Reste l'Œuvre.
L’analyser me semble un procédé de critique à la fois trop facile et trop imparfait. Je me bornerai donc à donner sur elle, et pour ce quelles elles valent, toutes mes impressions. Car c’est peut-être, en définitive, la seule manière équitable de juger un poète que de dire ce qu’il suggère, que de montrer les portions de son âme qui vous ont tour à tour séduit ou subjugué, ce qui, dans sa mélancolie, sa colère, sa souffrance, avive ou guérit vos propres malaises... Puis cette critique-là ne comporte point d’arrêts — si doux à M. Jules Lemaître. — Seuls les artistes la goûtent, la comprennent — et cela suffit à mon ambition.
De tous les poètes de notre âge, M. Jean Richepin seul a vraiment fait revivre l’âme populaire. Nul n'a, comme lui, pénétré le cœur des humbles, partagé leur tristesse vu leur joie, goûté la saveur amère de leurs mornes amours, chanté l’ivresse qui console, béni l'apaisant sommeil dispensateur de rêves et d’oubli, fait vibrer avec cette émotion suraiguë les voix charmeresses de la Folle Aventure et de la Libre Vie, ces deux fées dont tout vrai poète a, pour sa part, subi le charme nostalgique.
La Folle Aventure et la Libre Vie, voilà ce qu’on retrouve, en dernière analyse au fond de son œuvre. Dans la Chanson des Gueux, c’est, notées pittoresquement en termes argotiques, alignées en rythmes lents et simples, évocateurs d’airs populaires, les nostalgies dont l’âme des vagabonds est pleine. Il semble qu'exprimée par eux elle vous pénètre davantage {92} la poésie rustique et quelque peu sauvage des coins abandonnés de la Grande Ville : – les terrains enclos de palissades où poussent librement les herbes folles ; les cabarets de barrière dont le jardin nu s’ouvre sur un spleenétique horizon de masures et d’usines crachant leur suie et leur fumée au-dessus des routes grises que nulle verdure n’égaie ; les chantiers propices aux idylles les nuits d’été…
Dans les Caresses, M. Richepin célèbre les quatre saisons de l’Amour, non point l’amour platonique et niais, non plus l’amour bourgeois parlant de baisers légaux et d’enfants légitimes ; et pas davantage l’amour poison, l’amour torture des jaloux et des sensuelles. C’est la belle ivresse de ceux qui se sont rencontrés un beau jour et qui depuis s’aiment à pleines lèvres. La chose durera ce qu’elle doit durer, mais du moins ils auront connu lui, le poète, elle, la jolie fille, les phases enchanteresses de la passion animale et simple :
L’amour que je sens, l’amour qui me cuit,
C’est l’amour tout simple et pas autre chose.
C’est l’amour vivant. C’est l’amour humain.
Je serai sincère et tu seras folle ;
Mon cœur sur ton cœur, ma main dans ta main.
Et cela vaut mieux que leur faribole !
C’est l’amour puissant. C’est l’amour vermeil.
Je serai le flot, tu seras la dune,
Tu seras la terre et moi le soleil,
Et cela vaut mieux que leur clair de lune !
Et s’ouvre Floréal, le premier livre des Caresses. Les illusions et les roses fleurissent magnifiquement, et c’est plaisir de voir les amoureux respirer leur arome :
Mon cœur est un jardin plein d’œillets et de roses
Et plus loin :
O Maîtresse !...
Viens voir les prés, les bois, les étangs, les buissons.
Je veux que les oiseaux apprennent tes chansons.
Au second livre Thermidor, rugit la passion déchaînée du Poète :
Puisqu’à mon fauve amour tu voulus te soumettre,
Il faudra désormais le nourrir comme un maître,
Et tu sais qu’il est plein d’appétits exigeants.
Madame, il faut nourrir le feu quand on l’attise.
Et en vingt pièces : le Galant Jardinier, Pourquoi donc ?, Réveil, Tu dors ? Beauté Moderne, A corps perdu, etc., sont célébrées, les joies, les extases et les fatigues de l’amour sensuel. Puis la fête se clôt sur une mélancolique analyse de la passion moderne dont M. Richepin a très bien marqué le détraquement nerveux que finit toujours par amener la recherche obstinée d’une sensation nouvelle. A ce jeu, la sensibilité s’émousse, les nerfs s’ébranlent et la névrose apparaît au bord de l’abîme hideuse et grimaçante – mais si pittoresque !
Notre espoir, dédaigneux des paradis antiques,
Est en route pour des pays transatlantiques.
Là-bas, c’est le sol neuf, étrange, absurde, fou !
Nous voulons le trouver, nous ne savons pas où
Mais nous fuyons l’amour ancien comme une geôle,
Et notre âpre débauche à l’INCONNU pour pôle
Ah ! l’automne vient aux amours comme aux années, c’est par ce cri mélancolique et désabusé que s’ouvre le troisième livre : Brumaire. Nous allons assister maintenant aux mille brouilles qui, de loin, préparent la définitive rupture. Les cœurs sont las d’avoir trop aimé, les âmes tristes d’avoir aussi trop espéré, la chair est repue et l’amitié morte ! Qui est-ce donc qui peut les lier encore ces deux êtres dont la Joie a été si courte mais si complète ? L’Habitude, hélas ! c’est elle qui les fait maintenant s’étreindre encore et se caresser comme aux plus beaux jours ; c’est elle qui, après une dispute, fait dire à l’un d’eux :
Ne me fais pas ta lippe, enfant ! souris moi donc !
Qu’est-ce que je t’ai fait ? J’en demande pardon.
Tu sais bien que c’est mal de t’obstiner quand même,
Et qu’un tout petit rien fait souffrir lorsqu’on aime.
Ton geste de colère et ton dépit moqueur
Me font venir de gros sanglots au fond du cœur.
Et voici, lugubre et désespéré, le cantique d’agonie qui retentit :
Le cadavre est lourd
Qu’en mes bras je porte
Car ma pauvre amour
Est morte.
Loin, bien loin d’ici
Que la mer m’emporte !
Qu’elle emporte aussi
La morte !
Loin ! il faut m’enfuir,
Au diable, n’importe !
Je veux m’enfuir
Morte !
Nivôse, c’est le livre des souvenirs et des regrets. Les raisons, bonnes ou mauvaises que l’on se donne à soi pour s’excuser d’avoir rompu et les pitiés tendres pour celle qui n’est plus là ; les : « tu m’as fait souffrir » et les « Je te pardonne » et puis enfin voici, vainqueur, venir l’oublie bienfaisant qui console de vivre et d’avoir aimé !
La place me manque maintenant pour dire un mot des Blasphèmes dont je n’aime ni la rhétorique creuse ni la forme souvent lâchée, mais où l’on trouve cependant quelques pièces d’un lyrisme grandiose. Comment me résigner, d’autre part, à parler de la Mer en quelques lignes ? Car dans ce livre on retrouve le merveilleux ouvrier de la Chanson des gueux et le poète exquis des Caresses, n’est-ce pas dire par là que ce dernier poème est un chef d’œuvre ?
Vraiment oui. Les jeunes gens qui du haut de leur morgue insultent M. Richepin m’ont tout l’air de l’avoir jugé sur quelques facéties un peu grosses du premier livre des Blasphèmes. Il est regrettable, pour eux, qu’ils n’aient pas poussé plus loin leur enquête, ils auraient découvert, bien tardivement sans doute, que M. Richepin est un des poètes les mieux doués de ce temps et, comme nous, ils rendraient hommage aux magnifiques dons par lesquels ils rendraient hommage aux magnifiques dons par lesquels il demeure un rare et exceptionnel artiste.
Georges BONNAMOUR
Er. Lys, « La vie mondaine –
Sports athlétiques », La
Liberté, 20 juin 1890, p. 2.
Ce document est extrait du
site RetroNews.
[…]
Vous vous souvenez qu’après la première représentation du cirque privé de la rue Bénouville, des censeurs austères poussèrent des exclamations indignées. Songez donc ! des gens du monde faisant exercices d’acrobates ! Quelle déchéance !
Pour convertir ces austères, je les voudrais emmener là-bas, s’il pouvait rester une place pour eux dans ce décor d’opéra-comique (car, au cirque Molier, où tout est original, ce sont les spectateurs et spectatrices qui sont dans le décor), ils y comprendraient tout ce qu’a d’élevé la culture physique de l’adresse et de la force, quand on la pousse à ce degré.
Ils convient dans leurs salons des poètes qui récitent des vers. Il y a souvent plus d’harmonie dans une série de mouvements athlétiques bien combinés que dans les strophes les mieux cadencées. D’ailleurs, les uns n’empêchent pas les autres. Demandez plutôt au poète Jean Richepin.
Vous savez s’il est un prestigieux jongleur de rimes et un dramaturge vigoureux. Eh bien ! il vous montrera qu’il jongle de même avec les bouteilles, les assiettes ou les poids. Et l’auteur des Caresses de la mer, de la Glu et du Flibustier n’est pas moins fier d’une situation scénique tragiquement dénouée que d’un « Rétablissement » savamment exécuté.
Le temps est fini des « rêveurs à nacelles, des amants de la nuit, des lacs, des cascatelles », trop débiles pour emporter dans leurs bras la bien-aimée, au-dessus d’un ruisseau. La guerre nous apprit qu’il faut autant de muscles que de science pour assurer la vie d’un peuple.
La vigueur physique est remise en honneur. Le lendit et le volontariat lui ont été de puissants auxiliaires. Quand le volontariat fut inauguré, quelles sont les mères qui ne se rappellent la transformation de leurs fils ?
Quel chétif enfant elles avaient cm, brassé au seuil de la caserne ! Le teint était blême, la gorge sensible au froid, au chaud. Quelles précautions recommandées, quelles flanelles et quels foulards ! Quelle angoisse au moindre accès de toux !
Au bout de l’année, quelle surprise devant le gaillard que rendait régiment ! On avait peine à le reconnaître avec sa tête rasée court, son visage hâle, le pas solide et retentissant que lui faisaient les basanes et l’éperon. Mais aussi quelle étreinte sur sa poitrine plus large, entre ses bras plus forts ! L’enfant était un homme.
Au fond, madame, vous vous êtes retrouvée fière, en votre émotion, du soldat carré, robuste, résolu que vous aviez couvé avec vos menus soins, vos appellations de bébé, vos diminutifs. Comme la poule étonne, apeurée d’abord, vous avez été reconnaissante à votre hanneton de s’être si bravement jeté à l’eau et d’en sortir ainsi ruisselant, brillant et gai.
C’est ainsi qu’il pourra, plus longtemps et mieux, vous choyer à son tour
Er. Lys.
Novembre↑
Paul Verlaine, « Quelques
amis », Le Chat noir,
29 novembre 1890, p. 1652.
Jean Richepin
Spélicans !
François Villon
Richepin
N’est pas le nom d’un turlupin
Ni d’un marchand de poudre de perlinpinpin
C’est le nom d’un bougre de gentil copain.
Ecoutez :
Il blasphème de tous côtés,
Aux Bourgeois même il dit de sales vérités ;
Ses marins à l’Opér’ Com’ seraient peu cotés.
Tout le mal
Il le chante d’un ton normal
Et c’est, à dire vrai, le plus pire animal.
Mais les Gueux,
Combattant, souffrant avec eux,
Il les aime de quel amour noble et fougueux !
Paul Verlaine
Maurice Isabey,
« Bibliographie », Le Chat
noir, 29 novembre 1890, p. 1654.
[…]
Les Truandailles, de Jean Richepin, sont le commentaire de la « Chanson des Gueux » de terre et de mer ; le poète revient à ses loqueteux lamentables, grotesques, souvent sublimes, presque grandioses, qui, de leurs haillons, jettent un défi orgueilleux à nos bourgeoises existences, et, plus pauvres que Job, parcourent les champs et les grèves au bon soleil de la liberté. – (Charpentier, éditeur.)