Corpus de textes du Laslar

1903

Janvier

Jean Drault, « Le Procès Richepin-Belasco », La Libre Parole, 1er janvier 1903, p. 3.

Ce document est extrait du site RetroNews.

La Presse d’avant-hier a publié une interview qui a eu lieu entre un de ses reporters et M. Richepin, au sujet d’un plagiat dont ce dernier aurait été victime de la part d’un Américain. « Il y a deux ans et demi, raconte la Presse, un Américain, M. B..., se présentait chez M. Jean Richepin et a peu près en ces termes lui faisait cette proposition : « Je viens vous demander une pièce pour l'Amérique. Je vous donne aujourd’hui une certaine somme, je vous donnerai une autre somme à la remise de la pièce. Si elle est agréée, vous toucherez des droits d’auteur dont l'argent reçu sera à déduire ; sinon, ce que vous aurez touché vous sera acquis. » M. Richepin, après avoir pris avis de M. Roger, l’agent dramatique décédé, dont la succession donna lieu à des discussions si passionnées, écrivit un drame en prose, la Dubarry, l’expédia en Amérique. Il lui revint, dix-huit mois après, avec la mention : refusé. Mais il apprenait, peu de temps après, que M. B... faisait jouer une Dubarry en Amérique II attaquait aussitôt en plagiat M. Belasco, l’auteur américain, que je puis bien nommer, puisqu’il m’envoyait, il y a quelque temps, la lettre suivante : 

OFFICES OF DAVID BELASCO

CARNEGIE HALL NEW-YORK

BENJAMIN F. ROEDER

GENERAL MANAGER

Monsieur Jean Drault,

La Libre Parole,

Paris.

Monsieur,

J’ai l’honneur de vous soumettre une copie de ma réponse aux allégations de M. Jean Richepin, dans un procès au sujet de ma nouvelle pièce Du Barry. Permettez-moi de vous dire que toutes les accusations que je porte dans ce document, soit spécifiées, soit sous-entendues, sont portées avec pleine connaissance de l’influence grave quelles peuvent avoir sur les affaires et la manière d’agir de M. Jean Richepin.

J'ajouterai qu’étant pour ma part parfaitement responsable, je suis prêt à établir la preuve de ces accusations et que j’ai l’intention de le faire en temps opportun.

En vous remerciant de votre obligeance, je vous prie d’agréer mes sincères salutations.

David Belasco.

Sans prendre parti ni pour M. Richepin, ni pour son adversaire, je pense qu’il peut être intéressant, M. Richepin ayant confié les motifs de sa plainte à la Presse, d’accueillir la demande de M. Belasco et de reproduire ici les principaux arguments de sa défense.

Une des principales allégations de M. Richepin est celle-ci : 

« Je suis sûr, même gagnant mon procès, de ne pas recouvrer la moitié de ce que j’aurais pu gagner. J’ai pris un homme d’affaires à forfait, ce sont des frais, des ennuis sans nombre, et puis l’Amérique est si loin que vraiment... »

Heureusement, ai-je pris quelques précautions ; le jour où le manuscrit est revenu, j’ai fait parapher chaque page par un huissier Ainsi on peut bien témoigner que la version américaine est presque identique. Je dis presque, car M. B... a eu la complaisance de changer quelques adjectifs. La donnée de l’œuvre et le scénario sont les mêmes. » M. Richepin résume ainsi le sujet de son œuvre : 

C’est l’histoire de la courtisane. Au premier acte, elle a dix-huit ans, c’est la petite ouvrière parisienne qui rit, qui s’égaie, qui s’amuse ; au dernier acte, c’est la charrette qui la conduit a l’échafaud, elle a quarante-cinq ans, et elle a vécu.

L’œuvre fut présentée à M. Claretie, qui hésita à la recevoir pour deux raisons : la difficulté de trouver l’interprète capable de réaliser ce tour de force, d’être une gamine et une vieille femme, puis la difficulté de la mise en scène. En Amérique, on dépensa plus de 150,000 francs pour cette pièce, qui est encore applaudie depuis le temps qu’on la joue.

Voici ce qu’objecte l'Américain Belasco : 

NEW-YORK SUPRÊME COURT County of New-York

JEAN RICHEPIN, plaignant, contre DAVID BELASCO, défendant.

Le défendant répond au plaignant ce qui suit : 

Il allègue que le plaignant s’est engagé à imaginer, écrire et livrer au dit défendant une nouvelle pièce intitulée La Dubarry, le 1er juillet 1900 ou avant cette date, et que comme incitation pour le défendant à contracter le dit engagement et pour le décider, le plaignant promit, affirma et représenta que la dite pièce écrite par lui-même, serait originale et nouvelle et serait entièrement satisfaisante au dit défendant ; et que, se fiant à ces affirmations, représentations et promesses et pas autrement et les croyant vraies, le défendant paya au dit plaignant à la signature et a la mise en vigueur de rengagement mentionne ci-dessus, la somme de mille dollars, laquelle somme comme avance sur les droits d’auteur. Ce défendant nie qu’après cette époque et en accord avec ledit engagement, le plaignant lui ait livré et qu’il ait accepté le manuscrit de ladite pièce, mais il allègue que le plaignant lui a livré un manuscrit d’une certaine pièce intitulée : La Dubarry, et qu’à la date de cette livraison et avant d’examiner ledit manuscrit, qui était en français, et croyant que ladite pièce était nouvelle et originale et qu’après traduction et lecture elle lui donnerait satisfaction, il paya la somme de quinze cents dollars, et qu’après cela ce défendant a lu ledit manuscrit et a trouvé que ladite pièce n’était une œuvre ni originale, ni nouvelle, mais avait été tirée, plagiée et copiée par le plaignant de sources connues et de publications répandues et accessibles au public ; le défendant allègue, en outre, que ladite pièce ne lui donna pas satisfaction, fait qu’il notifia au plaignant, et que ledit manuscrit de la pièce fut ensuite rendu au plaignant et accepté par lui.

Il est très certain qu’au travers du charabia juridique de cette traduction américaine, le dernier argument de l’Américain Belasco semble quelque peu pécher par sa base.

Etant donné qu’il n’avait pas exigé de Richepin un genre de pièce particulier, Richepin avait le droit d’écrire une pièce historique. Et faisant une pièce historique, Richepin avait non seulement le droit, mais le devoir rigoureux de puiser à des sources sérieuses. Belasco eût été beaucoup plus fondé à refuser le manuscrit de la Dubarry, si Richepin lui avait fourni une Dubarry de pure imagination. Et lui, dans la Dubarry, qu’il revendique comme étant de lui, s’est-il abstenu de plagier » les « sources connues ? » Nous voulons d’ailleurs bien le croire quand il allègue un peu plus loin, que « cette pièce de la Dubarry produite par lui au National Théâtre de la ville de Washington (district of Columbia), est une pièce écrite par lui-même » et entièrement composée et imaginée sans l’aide et l’assistance de la pièce livrée à lui par Richepin. Racine et Pradon purent écrire chacun leur Phèdre sans que l’un des deux songeât à accuser l’autre de plagiat, et l’histoire de la Dubarry est du domaine public. Or, Richepin ne dit-il pas, dans la Presse, que sa pièce n’est que l’histoire de la Dubarry ? En tout cas, on ne s’explique guère pour quoi cet épisode judiciaire revient sur l’eau aujourd’hui. La mésaventure de Bergerat avec la Pompadour et celle d’Hervieu avec Théroigne de Méricourt, ne semblent pas détourner Richepin de mettre à la scène une troisième cocotte historique qui aura vraisemblablement le même sort que les deux autres, le document précis ne valant pas, au théâtre, l’imagination, la fantaisie et les anachronismes judicieux d’un Alexandre Dumas. Richepin spécule sur le plagiat, vrai ou pré tendu, dont il aurait été victime ; car c’est une bonne fortune, aujourd'hui, que d'être c’est souvent le seul-moyen de faire parler de son œuvre. Et puis, de quoi se plaint-il ? Il a une demi-satisfaction, si j’en juge par le document suivant : 

DOSSIER A

Richepin v. Belasco

Messieurs Howe et Hummel,

Messieurs,

Le défendant trouvant que la somme demandée dans ce procès est trop petite pour valoir la peine qu’il supporte les dépenses, frais et perte de temps nécessaires à la conduite du litige d’après ses droits, a décidé de payer le montant demandé dans la plainte. Cependant il désire qu’il soit clairement com pris qu’en payant cette somme il ne reconnaît pas la réclamation du plaignant et qu’au contraire il nie que le plaignant ait aucune cause d’action par suite des allégations conte nues dans la plainte, ni par suite d’aucune autre raison ou cause ; et il nie en outre qu’il doive au plaignant aucune somme quelle qu’elle soit. Nous avons l’honneur, etc. Dittenhoefer, Gerber et James. Bergerat et Hervieu, avec la Pompadour et Théroigne, jugeront que Richepin a eu plus de bénéfice à n’être pas joué, qu’eux à être joués.

Jean Drault.

Anonyme, « Chronique », L’Étendard, 7 janvier 1903, p. 2.

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Pourquoi, dans notre pays de France où les choses de l'esprit ont cependant un rang à part, les œuvres littéraires sont-elles moins protégées contre l'imitation que les denrées commerciales ? On voit, en effet, resplendir sur les boites de sardines, sur les pianos et sur les tablettes de chocolat de superbes étiquettes portant ces mots ; la loi punit les contrefacteurs. Or, ceci n'est écrit sur aucun livre, sur aucune œuvre littéraire. Les peintres, les sculpteurs peuvent mieux se défendre contre les faussaires, — pour appeler les imitateurs par le seul nom qui leur convienne — que l’auteur d’un roman ou d'une pièce de théâtre. Si on imite leurs œuvres ou leur signature, on est passible des tribunaux et toujours condamné à une forte amende ou à de la prison. Il est fort difficile à un littérateur de se défendre pareillement. J'en puis citer deux exemples frappants, qui sont d'hier et d’aujourd’hui.

Un beau jour, M. Jean Richepin voit arriver chez lui un imprésario d’Amérique, qui lui commande une pièce de théâtre dont la première représentation aura lieu là-bas, et il lui offre de signer un traité splendide. M. Richepin accepte, signe, compose la pièce et l’envoie. Elle lui est retournée au bout de quelques mois avec la mention : refusée. Mais, après quelques mois encore, une pièce ayant le même titre et ressemblant ù la sienne à quelques adjectifs près, est donnée en Amérique avec un succès énorme : on l’y joue encore. Heureusement, à la réception de son manuscrit refusé, M. Richepin avait eu la bonne idée d’appeler un homme de loi et de faire apposer sa signature sur chaque page de son œuvre. II lui sera donc peut-être possible de se faire rendre justice et de retirer quelque bénéfice d’une œuvre écrite par lui, mais représentée sous le nom d’un faussaire auquel elle rapporte une petite fortune. Mon autre exemple est plus ignoble encore. Et la chose est d’hier.

Le directeur d’une grande revue parisienne— oui, c’est bien « parisienne » que j’écris — demande à une jeune Norwégienne, qui connaît le français comme sa propre langue, un article documenté sur son pays.

Cette jeune fille n’est pas en France. Elle a regagné sa patrie à la suite de revers de fortune, et écrire dans une revue parisienne très connue lui ouvrira peut-être la porte d’autres revues.

Elle accepte donc avec reconnaissance et écrit l’article demandé. Il lui est retourné quelque temps après qu’elle l’eut envoyé avec une lettre où il lui était dit qu’on était désolé, mais que son article traitait justement la question norvégienne de la même façon qu’un article que la revue possédait déjà.

Ce qui veut dire que son étude, habilement- démarquée, fut refaite à peu de frais et ne coûta rien au directeur de la revue.

Comment se défendre en pareille occasion ? Quel recours avoir contre le faussaire ? C’est un autre côté de la question de la traite des blanches, et l’on devrait lui donner une solution afin d’obliger à plus de respect de l’œuvre d’autrui les directeurs indélicats de grandes revues parisiennes ou étrangères.

Février

R. de Bury, « Les Journaux », Mercure de France, 1er février 1903, p. 532.

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Dans le premier numéro du Gil Blas renouvelé (direction Périvier-Ollendorff), M. Jean Richepin a célébré avec éloquence les fastes de l'ancien Gil Blas, qui publia tant de pages brillantes ou curieuses, et même des chefs-d’œuvre. On est assuré que ce nouveau journal ne traitera pas la haute littérature avec dédain : c’est M. Maurras qui est chargé de la critique littéraire. Les Echos, signés Tallemant des Réaux, sont dignes de leur signature : et c'est dire beaucoup.

Avril

L. B., « Richepin plagié », Gil Blas, 5 avril 1903, p. 2.

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Vienne, 4 avril. —Le Deutches Volkslheater est poursuivi par le poète français pour plagiat de sa pièce La Dubarry. Le représentant viennois de M. Richepin invoque le paragraphe 51 du code autrichien, qui édicte une amende de 200 à 4.000 couronnes ou une peine à six mois d'emprisonnement pour la violation du droit d'auteur.

Jean Richepin avait écrit, en effet, entre le 18 juillet 1899 et le 1er juillet de l'année suivante, une pièce en trois parties, ayant ce titre, et il avait autorisé un sieur Belasco à la faire représenter aux Etats-Unis et en Angleterre.

Belasco opéra quelques changements insignifiants et s'appropria la pièce à telle enseigne, que par l'intermédiaire d'Hélène Odilon, qui faisait alors-une tournée en Amérique, il céda la pièce au théâtre viennois.

Le 8 novembre 1902, passant outre aux protestations de Richepin, le Deutches Volkstheater, joua La Dubarry, comédie en 5 actes, de David Belasco, traduction allemande d'Hélène Odilon.

Le texte de Richepin comporte trois parties. Le premier acte est intitulé « La Grisette »; le second, en 3 tableaux, « Le petit lever, l'orgie à Louveciennes et « Après la mort du roi »; le troisième, « l'amoureuse ».

La pièce représentée au Deutches Volkstheater, ne serait qu'une grossière traduction de l'œuvre très littéraire de Richepin, avec quelques changements de noms. L'amant de la Dubarry s'appelle, par exemple, au lieu de Rohan-Rochefort, Cossé-Brissac.

Le Deutscher Volkstheater et Mme Odilon prennent, ce semble, leur bien où ils le trouvent. On n'a pas oublié que M. Pierre Louys eut déjà maille à partir avec la même scène, à propos d'une pièce tirée à son insu de son roman Aphrodite et intitulée Chrysis.

La Carrière, d'Abel Hermant, fut représentée dans un autre théâtre de Vienne, sans que l'affiche portât d'autres indications d'auteurs que le comte Bombelles et le journaliste Engel.

Que ces actes de piraterie littéraire aient lieu dans quelque coin perdu de province passe encore, mais dans une capitale comme.

Vienne, c'est à n'y pas croire. — L. B.

Juin

Anonyme, « Nos auteurs », Le Monde Artiste, 28 juin 1903, p. 411.

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[…]

M. Jean Richepin est à Faremoutiers, près de Coulommiers. Il achève, dans le calme de la grande campagne, la pièce que l'Amérique lui a commandée. Titre : Mlle Napoléon. Trois actes et quatre tableaux ; 44 personnages parlant ou chantant. Mlle Napoléon, c'est Mlle Mars, et l'action se déroule à la Comédie-Française (1809) ; à Compiègne (toujours en 1809) ; au Café de la Paix et au Bal de l'Opéra (1815). Mlle Napoléon, ce sera Mlle Anna Held. L'œuvre de Richepin passera le 1er octobre au Knic Kerbocker-Theater de New-York.

[…]

Juillet

Anonyme, « Mademoiselle Napoléon », Le Monde artiste, 9 août 1903, p. 506.

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Nous sommes en mesure de donner quelques renseignements tout à fait inédits sur cette œuvre inédite de notre grand poète Jean Richepin.

A la suite du succès remporté à New-York par La Dubarry, la pièce historique que M. Richepin avait écrite spécialement pour l'Amérique, M. Ziegfeld, le directeur du Knickerbocker-Theatre, a tenu à avoir, lui aussi, une pièce de notre auteur. C'est donc sur commande, et avec un traité des plus avantageux, que M. Richepin vient de se mettre au travail et de composer Mademoiselle Napoléon, comédie en trois actes et quatre tableaux.

A peine achevée, Mademoiselle Napoléon a été lue ces jours-ci par l'auteur au directeur américain, qui repart demain lundi pour New-York avec le manuscrit, les maquettes des décors et les dessins de costumes. Et d'ores et déjà, la première représentation — qui sera certainement sensationnelle— est fixée aux derniers jours du prochain mois d'octobre.

Les costumes ont été reconstitués par M. Chaîneux, le dessinateur de la Comédie-Française. Les accessoires, les tableaux et les bustes qui figurent au foyer de la Maison de Molière, ont été copiés scrupuleusement. Quant à la musique de scène, elle a été confiée à un compositeur américain de grand talent, dont les Etats-Unis se disputent les partitions à prix d'or.

Mademoiselle Napoléon comporte quatre tableaux, avons-nous dit.

Le premier tableau représente le Foyer de la Comédie-Française en 1809. Tout le monde élégant de l'époque y figure :

Mme la duchesse d'Abrantès ; Mme Récamier ; la maréchale Lefebvre, Mme Sans-Gêne, Ney, Murât, l'Abbé Delisle, Geoffroy, le critique du Journal des Débats ; le peintre David ; Ducis, et les comédiens, Baptiste aîné, Fleury, Mme Raucourt, Talma, qui, ce soir-là même, joue le rôle de Néron dans Britannicus.

Le deuxième tableau représente le Parc de Compiègne, en 1809 toujours. Une grande pelouse, et l'étang où miroite un clair de lune changeant. Un kiosque praticable avec de curieux effets d'éclairage. Et, dans le fond, le château tout illuminé pour une fête de nuit. C'est dans ce décor qu'apparaît Napoléon avec Constant, son valet de chambre, Roustan, son mamelouk ; c'est là que se déroule une des plus jolies scènes de comédie que nous connaissions.

Le troisième tableau représente le Café de la Paix, tout en glaces, avec ses tables et ses divans ; avec son grouillement d'uniformes et de masques. Cinq ans plus tard. Nous sommes en 1814. Napoléon est à l'Ile d'Elbe.

Au fond, à gauche, l'escalier et le corridor qui communiquent avec la salle de l'Opéra. A droite, le beau comptoir en acajou du temps. Costumes de tous genres. A l'Opéra, il y bal masqué en l'honneur des Alliés, et le Czar et l'Empereur d'Autriche y coudoient les royalistes et les officiers russes, autrichiens, allemands et anglais. Des Gardes du Corps de Louis XVIII circulent dans la foule ; ils sont habillés en mousquetaires. Le Corps de Ballet de l'Opéra fait irruption dans la salle, et danse un pas populaire, le Rigodon. L'acte finit par une provocation aux Alliés et une bagarre très mouvementée.

Le quatrième tableau représente un coin du Dauphiné, 1814. Quinze jours après le Débarquement de Napoléon. La campagne. Une clairière. Au fond, une colline où se dresse un moulin à vent. C'est là que l'action romanesque et passionnante se dénoue, tandis que Napoléon, dans le lointain, passe avec son état-major et ses divisions, sorte d'apothéose dans le Soleil levant.

Les personnages principaux sont :

Mlle Mars ;

Napoléon ;

Le capitaine Noël, fiancé de Mlle Mars ;

Choupille, vieux comédien ;

Mme Philippart ;

Mlle Raucourt ;

La soubrette Flora ;

Fouché ;

Roustan ;

Deux Agents de la Police politique.

Mademoiselle Napoléon sera représentée d'abord à New-York, puis dans toutes les villes de l'Union et du Canada. Le directeur, M. Florence Ziegfeld, transportera matériel et artistes (200 personnes au moins) par un train spécial qu'il a fait construire et qu'il a dénommé Olympia-Car.

M. Ziegfeld qui a inauguré cette énorme affaire théâtrale, est le mari de Mme Anna Held. Cette célèbre divette, tout à la fois Réjane et Granier, créera le rôle de Mademoiselle Napoléon, qui exige tout ensemble une diseuse, une chanteuse et une danseuse de premier ordre.

Mademoiselle Napoléon sera donnée trois années de suite, quarante semaines par année : au total, huit ou neuf cents fois.

Enfin, pour que la langue si belle, si savoureuse et si éloquente de Richepin, ne perde rien de ses qualités brillantes, la traduction de Mademoiselle Napoléon a été confiée à un poète érudit, M. Herbert.

Tout cela est intéressant à un double point de vue : particulier, parce qu'une œuvre de M. Richepin constitue un véritable événement littéraire ; général, car cette tentative montre que le génie dramatique de nos auteurs tient toujours une place prépondérante dans les théâtres à l'étranger.

Août

Anonyme, « Echos – Le Voyage de Jean Richepin », Gil Blas, 4 août 1903, p. 1.

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La liste déjà longue des hommes de lettres français qui vont aux Etats-Unis, soit pour y conférencier, soit pour y surveiller la représentation d'une pièce de théâtre, s'enrichit d'un nom célèbre, celui de M. Jean Richepin, qui part en octobre. Il visitera tour à tour New-York, Washington, Chicago, et peut-être ira-t-il jusqu'au Pacifique, à San-Francisco, en passant par Saint-Louis, où des milliers d'Américains, Français d'origine, le réclament déjà.

Les Américains connaîtront, en sa robuste personne, un littérateur de race. Jean Richepin, qui n'est pas « gendelettre » le moins du monde, est cependant le type le plus complet de l'homme de lettres, ayant, avec la pensée hautaine, l'écriture impeccable et le souci constant de la forme qui, chez lui, est superbe.

Ce voyage aux Etats-Unis a été organisé par une femme de l'activité la plus intelligente et la plus lettrée, miss Marbury. Mme Richepin, dont la grâce parisienne et la beauté feront sensation dans la haute société américaine, accompagne son mari avec ses deux enfants.

La réception qui attend à New-York notre brillant collaborateur sera d'autant plus cordiale qu'on sait que sa venue en Amérique est indépendante de toutes combinaisons utilitaires — utilitaires pour certaines associations et compagnies — et que ce n'est pas à sa personne que s'applique le mot fameux que prononça M. Hyde, président de l'Equitable-Life et de l'Alliance française :

— Il faut faire parler les Français aux Etats- Unis pour les faire taire à Paris.

Anonyme, « Poèmes d’Opéra », Le Monde Artiste, 16 août 1903, p. 523.

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M. Jean Richepin aura bientôt trois pièces lyriques sur les affiches de nos scènes musicales.

M. Alexandre Georges termine en ce moment la partition de Miarka, la Fille à l'Ourse, œuvre tirée du roman de Richepin, qui a paru sous ce titre.

M. Camille Erlanger fait la musique de La Glu, — le drame célèbre dans lequel M. Henri Cain a taillé un fort beau livret d'opéra.

Enfin, M. Isidore de Lara met la dernière main à Soléa, un drame lyrique dont M. Richepin a bien voulu écrire les vers.