1925
Octave Mirbeau, « Jouets de
Paris », Les
Écrivains : première série (1884-1894), Paris, E.
Flammarion, 1925, p. 16-↑
[…]
Enfin que ce soit du grec, du français ou du bigorne, en prose ou bien en vers, nous savons maintenant que M. Richepin est revenu à sa famille. Nous savons même de quelle façon, avec quelle eau parfumée la triste Pénélope lava les pieds d’Ulysse repenti. On nous a mis dans la confidence de ce détail intime et bien athénien de sa vie. Mais rien n’est intime de ce qui a touché — de près ou de loin — à Mme Sarah Bernhardt. Sa maison est de verre, comme celle que rêvait Socrate, et tout le monde y peut regarder. On dirait aussi que ceux qui en sont partis gardent, autour d’eux, une sorte de lumière vive qui perce les retraites les mieux cachées et les fait reconnaître, même dans les nuits les plus profondes. Donc, M. Richepin est revenu à la raison, au calme de la vie, à la vérité des affections bénies. Que va-t-il faire de cela aujourd’hui ?
***
En dehors du cabotinisme dont il s’est plu à s’entourer, j’ai la plus grande estime pour le talent de M. Richepin. C’est vraiment un poète, d’un souffle superbe, et dont le lyrisme amer escalada souvent les cimes inexplorées, trop hautes pour les poumons malades de la plupart des rimailleurs parnassiens. Son premier livre fut La Chanson des gueux, qui restera dans notre littérature, à une place meilleure que les {17} satires de Mathurin Régnier. La Chanson des gueux nous donna un art nouveau, des rythmes nouveaux, une poésie magnifique et canaille où l’âme de Lamartine transparaissait sur des lèvres crispées de voyou. Il fit Les Caresses, ces vers d’une forme presque parfaite ; La Glu, si vibrante, si étonnante par les remuements de ses mots. Il y avait donc là de réelles promesses de gloire car, parmi les jeunes gens, aucun n’était mieux armé de bonheur et de talent que M. Richepin, et l’on aurait pu croire que, l’âge venant, les petites vanités, les petits ridicules dont il enveloppait sa personne, cette sorte de cynisme retentissant et poseur qu’il donnait à ses allures disparaîtraient tout à fait… C’est alors qu’il connut Mme Sarah Bernhardt et qu’il fut, par elle, affiché à la face de Paris, comme son poète aimé. Ces deux cabotinismes s’exaspérèrent l’un par l’autre, et ils en vinrent aux plus sombres folies. Il fallait que cela fût bien avéré que Mme Sarah Bernhardt avait mis sa griffe sur ce cerveau, et fait un jouet de cette pensée qu’on disait ardente et mâle. Richepin, barbouillé de fard, couvert de paillons, s’étala sur la scène. Le poète sombrait dans le comédien. Lui, le chanteur des grands ciels, qui dorent les guenilles des mendiants et réjouissent le dos maigre des gueux, lui, le chanteur des mers vastes qui hâlent le visage et bercent la pauvreté des matelots, il n’eut pour horizon que des toiles de fond aux cieux déteints, aux mers qui s’écaillent, et il ne vit plus que les {18} becs de gaz des herses à la place des étoiles dont ses yeux étaient pleins.
Il ne me déplaît pas qu’un homme se mette au-dessus des routines, des préjugés, des lois même, qu’il entre hardiment, les poings tendus, dans la révolte humaine, douloureux et sincère, qu’il crie à Dieu ses souffrances et ses doutes. Alfred de Musset l’a fait : mais, chez Alfred de Musset, ses malédictions sont pleines d’amour, ses blasphèmes pleins de croyances ; son orgueil, qui n’est que le cri momentané de l’âme inquiète et blessée, s’abat devant la toute-puissance de Dieu. Mais Jean Richepin, il continue avec Dieu la bonne farce qu’il a commencée envers les hommes, et il se croit obligé de se montrer à lui, comme il s’est montré à eux, en habit de comédien. Ses Blasphèmes sont la continuation de Nana-Sahib. Il prend Dieu pour un bourgeois qui a payé sa place au théâtre et il veut l’étonner. Il n’étonne personne, car ses Blasphèmes manquent de bravoure. Ils n’ont même pas cette crânerie malsaine de l’homme qui se dégrade devant des hommes, s’expose volontairement aux sifflets et aux pommes cuites. M. Richepin savait bien que Dieu ne le sifflerait pas.
Insulter Dieu en ce temps, où le blasphème est partout étalé, où il émarge au budget, où il trône en habits officiels sur les bancs du gouvernement, où il est devenu le credo des ministres et la religion des foules, où on le voit, ricanant la bouche tordue, sur les affiches, au {19} coin de toutes les rues, ne voilà-t-il pas un beau courage et une belle originalité. Insulter Dieu quand on le chasse des hôpitaux, des écoles, des armées, quand on le traque en tous lieux comme un ennemi, et qu’on n’ose plus lui donner nulle part un asile, comme à un maudit : mais c’est vous rabaisser, vous, un indépendant, au niveau des courtisans, de ces briseurs d’autels et de ces détrousseurs de temples ; c’est tomber, vous, un poète, dans la tourbe agenouillée des Belmontet qui, sous l’Empire, chantaient le 2 décembre et attendaient la croix au 15 août, pour prix de leur cantate. Ce qui eût été brave, ce qui n’eût point été banal, c’eût été de le défendre, de recueillir au pied de ses calvaires, son sang qui coule toujours, non point pour le jeter à la face du ciel, comme un jet d’immonde salive, mais pour le répandre sur l’humanité, comme une rosée d’espérance et de consolation.
***
M. Richepin, aujourd’hui, a payé largement sa dette à la fantaisie. Il va oublier et faire oublier, je l’espère pour lui, pour ses amis, pour la littérature, ses outrances et ses folies dans les joies retrouvées du ménage. Jouet entre les mains d’une femme, laquelle était elle-même un jouet entre les mains de Paris, il n’a pas été brisé. Il est sorti victorieux des mains de la {20} femme, mais la femme n’est pas sortie des mains de Paris. À qui le jouet maintenant ? Il n’en manque point dans la boutique à treize sous de la littérature : poètes blonds et crottés, comédiens à la face ridée, polichinelles et pantins. Allons, les ratés, les impuissants, les ventres creux ! Allons, les joujoux, allons les bijoux ! À qui le jouet, le nouveau jouet, le joli jouet de l’année ?
Janvier↑
Anonyme, « Une conférence de M.
Jean Richepin », Bonsoir, 8 janvier 1925, p. 3.
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Le maître Jean Richepin, de l’Académie Française, présidera, demain 8 janvier, à 20 h 30, dans la Salle des Fêtes de la mairie du Luxembourg (place Saint-Sulpice) une soirée artistique et littéraire. Le général de division Peletier parlera du « Soldat de France » et le maître Jean Richepin fera une conférence sur les « chansons militaires anciennes et actuelles ». Au cours de la conférence de nombreuses chansons seront interprétées par Mme Marie Delna de l’Opéra, M. Winkopp, de l’Opéra-Comique, et par la musique du 31° régiment d’infanterie.
Anonyme, « Une conférence de
Jean Richepin », L’Œuvre,
9 janvier 1925, p. 2.
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La municipalité du 6e arrondissement avait organisé hier une soirée artistique qui, présidée par M. Jean Richepin, de l'Académie Française, a obtenu auprès d'un nombreux public un succès enthousiaste.
Le général Peletier fit d'abord une causerie sur le soldat de France, au cours de laquelle il évoqua les longues campagnes des troupes françaises, depuis la fondation de l'empire des Francs jusqu'à la IIIe République, qui vainquit deux fois sur la Marne.
Puis le maître Jean Richepin, en une série de petites conférences spirituelles, ordonna et conduisit la plus charmante excursion à travers les chansons militaires anciennes et actuelles. Exécutées par la musique du 31e régiment d'infanterie, sous la direction du capitaine Flot, interprétées par M. Winkopp ou Mme Delna, de l'Opéra les chansons ont résonné, gaies ou martiales ou mélancoliques, depuis Auprès de ma Blonde jusqu'à la Marseillaise.
Les spectateurs, volontiers, reprenaient en chœur ces refrains qui les ont bercés dès leur enfance.
Puis l'on termina sur la Madeb lon, présentée en termes de flamme par le poète des Gueux et interprétée par son créateur, le tourlourou Mouret, qui fit, en culotte rouge, avec force gestes et l’accent méridional, gentil troupier d’avant-guerre, la chanson des poilus de la guerre.
Raoul Brunel, « Miarka », L’Œuvre, 23 janvier 1925,
p. 5.
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Miarka, jouée, il y a quelque vingt ans, à l'Opéra-Comique, où elle méritait une plus durable carrière, a reparu à l'Opéra, dans une version nouvelle et très simplifiée. Réduit ainsi aux épisodes de pur lyrisme, avec un scénario sommaire, comme il conviendrait à un ballet, le bel ouvrage de M. Alexandre Georges a moins souffert de cette « compression » qu'on n'aurait pu le craindre. Il a d'ailleurs beaucoup plu au public de l'Opéra, qui ne lui a ménagé ni les applaudissements ni les « bis ». En somme, le noyau de la première version était constitué par les Chansons de Miarka, restées si populaires, et que M. Alexandre Georges avait trouvées dans le beau roman de M. Jean Richepin. Le grand poète les relia par une action tirée du roman, et c'est ainsi que ce recueil de chansons devint un drame lyrique. Ces intercalations sont réduites aujourd'hui au minimum, mais l'essentiel de l'œuvre est resté. Au premier acte, c'est la naissance de Miarka et la prophétie de la Vougne qui lui prédit qu'elle sera reine un jour. Au second, Miarka a 16 ans : elle chante ses chansons, elle se dérobe à l'amour violent d'un compagnon brutal ; la Vougne juge qu'une Romané née n'est pas faite pour rester en un logis, et elle la force à l'exode en mettant le feu à la maison. Au troisième, sur la grand'route, la Vougne va mourir, mais elle a le temps de voir le roi des Romanes élire Miarka pour son épouse et d'assister aux fêtes des noces.
La partition de M. Alexandre Georges est d'une très belle tenue musicale. Ecrite dans une langue probe et savoureuse, elle est d'une inspiration mélodique très franche, et c'est à juste titre que maintes de ses pages, comme la Chanson du soleil ou celle de L'eau qui court sont restées dans tant de mémoires. Elle est orchestrée avec une rare habileté, délicieuse dans les paysages de charme ou de pittoresque, atteignant la puissance dès qu'il le faut. L'instrumentation, très nourrie, m'a même paru révéler davantage, à l'Opéra, sa filiation wagnérienne qu'à l'Opéra-Comique, où les moyens mis à sa disposition n'atteignaient pas à la même ampleur.
Mlle Yvonne Gall a remporté un gros succès avec son interprétation du rôle de Miarka, tout empreinte de fraîcheur et de grâce, servie par une voix d'une pureté impeccable et d’une admirable science de l'art du chant, Mme Lyse Charny, toujours si émouvante, tragédienne lyrique comme nous en possédons peu à l'heure actuelle, incarné la Vougne farouche, aux accents mâles et cependant si tendres. MM. Dutreix, Duclos, Dallerant tinrent les rôles masculins avec distinction. Le ballet, réglé par M. Léo Staats, avec un joli sens de pittoresque, mérite une mention spéciale. Il est tout à fait charmant et Mlles Franck, Delsaux, Brana, Ellenskaya, Bourgat et Mantoux, toutes gracieuses, s'y firent longuement et justement applaudir.
La mise en scène de M. Chéreau, toujours si intelligente, rend l'œuvre très vivante : la scène de l'incendie a même été poussée jusqu'à un léger commencement de réalité. L'orchestre, dirigé par M. Henri Busser, s'est montré, comme à l'habitude, à la hauteur de sa juste réputation.
RAOUL BRUNEL.
Février↑
Anonyme, « Déjà au temps de
Brantome le mot “Flapi” était français », Le Petit Parisien, 13 février 1925,
p. 1.
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L'Académie l'avait rejeté ; M. Jean Richepin, s'appuyant sur l'autorité de l'auteur de la Vie des Dames galantes interjette l’appel.
L'Académie française est un tribunal dont les décisions peuvent être frappées d'appel. M. Jean Richepin usera de cette latitude en faveur de flapi, qu'il a trouvé dans Brantôme, et qui, à ce titre, a bien quelque droit à figurer au dictionnaire. Dans une dernière revision qui précédera le « bon à tirer » de l'édition qu'on prépare, on reparlera de flapi. On reparlera également de firme, précédemment rejeté.
En attendant, hier, on a admis garage, garagiste, grivoiserie, grouse, haut-parleur (la voilà bien l'influence de la T. S. F. !), haveneau (filet de pêche à la crevette).
Le Flâneur et le Glaneur,
« Echos », La Presse,
19 février 1925, p. 2.
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[…]
Les anciens élèves des écoles militaires préparatoires viennent de se réunir en assemblée générale. Et ils n'ont pas manqué d'acclamer le nom de leur président d'honneur, l'ancien enfant de troupe Jean Richepin.
A douze ans, comme Bara, comme Viala, comme Strauh, Jean Richepin était tambour, et ses « ra », ses « fla », ses « roulements » impeccables entraînaient le régiment d'infanterie dont son père était le médecin-major.
Lorsque le poète de la Chanson des Gueux, candidat à l'Académie française, rendit visite au marquis Melchior de Vogué, celui-ci lui montra avec orgueil une magnifique panoplie ornée d'un superbe tambour.
Jean Richepin décrocha le tambour, ceignit le baudrier et régala son hôte ébahi de la marche authentique du « Royal Vogué », le régiment des ancêtres du marquis.
– Ce discours vibrant vaut bien une voix, dit Melchior de Vogué, plus étonné et plus ému qu'il n'eût voulu le paraître.
Avril↑
Paul Gordeaux, « M. Jean
Richepin fait un tour de poésie », Le Soir, 5 avril 1925, p. 3.
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M. Jean Richepin avait accepté d’inaugurer les « tours de poésie » du Music-Hall des Champs-Elysées.
Il rappela que les poètes du Moyen-Âge étaient des trouvères qui déclamaient ou chantaient leurs propres œuvres et qui se sentaient proches parents des acrobates puisqu'ils se laissaient volontiers appeler « jongleurs. »
Puis, il récita quelques-uns de ses poèmes : les Ménétriers — que Damia a rendus populaires — la Glu — un des plus grands succès d’Yvette Guilbert. — les Pêcheurs à la ligne, la Ballade aux Mauvaises étoiles, et celle des Bonnes étoiles, et celle du malheureux qui regrette la vie, dont pourtant il n'eut jamais rien.
L’éminent académicien, qui parle avec bonhomie, avec esprit, avec verve, et qui dit avec talent, obtint un gros succès.
Mlle Nina Kochitz, la grande cantatrice de l’Opéra, a la plus belle, la plus étendue, la plus pure et fraîche des voix de soprano. On l’acclama dans la Femme du Soldat, fie Rachmaninoff, dans la Romance orientale, de Rimskv Korsakoff, dans Rêverie et Danse, de Moussorgsky.
M. Roltert Goldsand n’a que treize ans et déjà, paraît-il, on le compare à Paderewski. Soyons franc : il ne rappelle en aucune façon le grand virtuose qui fut le premier président du Conseil de la Pologne ressuscitée. Mais Paderewski serait le premier à applaudir son mécanisme sûr. sa jeune maîtrise, son assurance et son brio.
Voici, enfin, de vrais numéros de musichall :
Hermanova et Paderewski, dont les danses bottine grâce indicible, Archie Godal1, dont le numéro est athlétique et audacieux, The Marimba Band, oui sont passés maîtres au xylophone, les Girls de Mme Walker, qui présentent avec un humour allègre les autres numéros du programme et, enfin, l'extraordinaire Jazz des Billy Arnold, célèbre à Deauville et à Cannes, et qui joue avec l’art le plus original, le plus imprévu, le plus amusant, les blues et les fox-trot, les plus uf>-to date, et accompagne à ravir les danses excentriques, précises et savoureusement drôles de Johnson et Ted Lewis, qui font avec leurs jambes désarticulées et leurs J lieds agiles, de l’humour — et du meilleur.
Enfin. M. Dorvil le, prince des « farceurs » de café-concert, joue avec la belle, la spirituelle Marcelle Praincc, un sketch,cun peu gros, mais hilarant de M. Al in Monjardin.
Magnifique programme, en vérité. Mais, déjà, MM. Rolf de Ma ré et André L. Daven y ont effectué d’importants changements.
C’est ainsi que M. Paul Fort, prince des poètes, va y remplacer M. Jean Richepin.
La gaieté. l'esprit, la grâce, la force, l’adresse. 1 originalité se sont installés en maîtres au Théâtre des Champs-Elysées.
Il ne reste plus qu’à y créer « l'atmosphère » du music-hall.
Mais elle s’y créera toute seule, peu à peu.
Paul Gordeaux.
P. B., « Les poètes du
Music-Hall », La Petite
Gironde, 22 avril 1925, p. 1.
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Le diable devenu vieux se fit ermite. Le music-hall compte assez d'années pour avoir enfin souci de sa réhabilitation. On l’a tant convaincu d’ineptie chronique qu’il adore aujourd’hui ce qu'il a brûlé. Il avait galvaudé la poésie « dans les sentiers remplis d’ivresse », confondu son vol avec celui de l'oiseau qui vient de France ». Il fait amende honorable et donne « un tour » au lyrisme le plus noble, entre un numéro d’acrobates et une chanson des fortifs. Jean Richepin, Paul Fort, Maurice Rostand, montent sur les tréteaux et sont acclamés.
C’était bien « leur tour ». Puisque le grand public est composé aujourd'hui, comme les lecteurs de Rabelais, des plus honnêtes gens et de la canaille, pourquoi ne pas donner à ceux-là un peu d’air pur, dans l’atmosphère enfumée, avec des sonorités harmonieuses et des élans vers les étoiles, les autres... ? La rage de tout avilir, de dégrader le théâtre sous prétexte de répondre « aux besoins » des spectateurs », aurait-elle enfin disparu chez les étranges entrepreneurs de joies publiques que nous avons connus ?...
Le clairon de Jean Richepin a sonné l’assaut. Paul Fort a illuminé les esprits avec ses fresques, ses légendes d’hier et d’aujourd’hui. Maurice Rostand, dans une forme classique en dépit de ses foucades de rythme, affirme la plus généreuse et la plus torrentielle inspiration lyrique de sa génération. Et ils sont applaudis. C'est simplement prodigieux. Et cependant c’est logique. Il y a vingt ans, le malheureux journaliste qui tentait d’écrire un français surveillé, ou de toucher à des sujets littéraires, était dédaigné des « purs » et tenu à l’œil par la direction. Aujourd’hui, il y a dans tous les journaux dits populaires deux ou trois rubriques littéraires, sans compter les chroniques des maîtres écrivains. C’est trop beau pour durer. Ce siècle est jeune, ça ne sait pas. On le croyait le plus pratique de tous, et il entre en religion littéraire ! P. B.
Mai↑
Claude Berton, « Les
auteurs-acteurs », Les
Modes de la femme de France, 31 mai 1925, p. 20.
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[…]
Et voici pourquoi nous avons vu des auteurs dramatiques s'improviser acteurs. Colette, Sarment, Fauchois, Verneuil, Tristan Bernard, Crommelink jouent leurs pièces. Ce qui était exceptionnel, il y a quarante ans, lorsque Jean Richepin, par exemple, s'avisa de paraître dans son drame Nana-Sahib, à la Porte Saint-Martin à côté de Sarah, est un spectacle aujourd'hui fort courant.
[…]
Août↑
Nozière, « En Hommage à Jean
Richepin », L’Avenir,
27 août 1925, p. 1.
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L’autre jour, nous avons fêté Jean Richepin. Il passe ses vacances en Bretagne, au Val-André. Tout près est la station nouvelle que M. Brouard fait miraculeusement sortir des dunes : Sables-D’or-les-Pins. Comme l’indique ce nom, il y a près de la mer, un bois. Et, dans ce bois, savez-vous ce qu’il y a ? comme dit la vieille chanson : il y a un théâtre de verdure. Déjà ! Sur cette scène champêtre voisine des flots, on joua donc le Flibustier. M. Jean Worms interpréta le rôle créé par son père. Le poète en fut ému profondément. Il rendit hommage au talent et au caractère de l’illustre sociétaire, qu’il retrouvait en son fils. Il rappela que sa pièce avait eu aussi pour interprète Mme Barretta Worms. Malgré les efforts d’Antoine, on refuse le ruban rouge à celle actrice, qui est l’honneur du théâtre. La raison en est comique. Il parait que jamais on n’a décoré un artiste de la Comédie-Française qui n’était plus en activité d’emploi. Il n’est pourtant pas infamant, d'avoir demandé sa retraite. Mme Barretta Worms s’y décida trop tôt. Elle a donné ainsi l'exemple à ceux et celles qui, malgré l’âge, demeurent sur les planches. Cette obstination devrait leur interdire l’accès à la Légion d'honneur.
Donc, Jean Richepin — était venu et il écouta avec bienveillance ces vers de circonstance :
Dans ce décor vivant où frissonne le pin
Près des vagues chaulant leur hymne magnifique,
Le Flibustier revient de son voyage épique.
Son père est parmi nous ; saluons Richepin !
Saluons Richepin ! Saluons le grand maître,
L'arbre miraculeux qui n'a jamais jauni.
Le chêne aux bras puissants que chaque an rajeunit ;
Saluons la verdeur divine de l'ancêtre.
Saluons Richepin très bas parce qu'il aime
La Mer et ses héros obscurs, les méconnus,
Et les Gueux qui s'en vont sur les routes, pieds nus :
La pitié fraternelle inspira son blasphème.
Saluons Richepin qui, dans un vers sublime,
Fut plus religieux qu'un poète qui croit
Quand il sut indiquer aux hommes cette cime :
Il faut monter toujours, monter jusqu'à la croix. »
Saluons Richepin dont la chanson si tendre
Nous a montré ce cœur de mère sanglotant.
L'humanité toujours pleurera de l'entendre :
« T’es-tu fait mat, mon enfant ? »
Le Chemineau revient vers le pays quitté...
« Je songe aux blés coupés qui ne sont pas les nôtres
Et dont les épis mûrs font du pain pour les autres... »
Saluons Richepin, prêtre de l'équité !
Saluons Richepin ! Il est beau comme un roi
Qui mène à son destin la Bohème farouche ;
Les chansons de Miarka fleurissent sur sa bouche :
Son aile abrite ceux qui n'ont jamais de toit.
Saluons Richepin ! Il semble la statue
D'un dieu marin, tallée en un granit, breton :
Son front est couronné de l’algue et de l'ajonc :
Contre ce roc en vain la vague s’évertue.
Saluons Richepin que la morbide indigne !
Sa santé sert d’exemple aux hommes affaiblis
Qui puisent, aux poisons l'ivresse des oublis ;
Il ne s'est exalté que du sang de la vigne.
Saluons Richepin, force de la nature !
Tels le vent ou la pluie au langage perlé.
Pour le chanter, c'est peu que la littérature :
Il faudrait l'eau qui court, si l’eau pouvait parler.
La Muse de Villon, terrible et familière.
Lui sourit : truculent, il lit Monsieur Scapin :
Il précéda Rostand, continuant Molière !
Nous l’avons parmi nous ; saluons Richepin !
El la représentation du Flibustier fut très belle. Les interprètes, parmi lesquels était M. Albert Reyval, de la Comédie-Française, éprouvaient une heureuse fierté à jouer devant le maître ; le décor créé par M. Juvenet était riche en vieux meubles et fort harmonieux : l’assemblée était étrangement recueillie. C’est que la présence du poète opérait. Et puis, la brise de mer, les vagues si proches créaient l'atmosphère de l'œuvre. Spectateurs et spectatrices pleuraient doucement. A la fin de la pièce les acclamations arrachèrent des pleurs à Jean Richepin, qui remercia, en déclarant :
— Vous m'avez rajeuni de plus de quarante ans.
Il éprouvait les sentiments qui l'avaient secoué quand fut créée la pièce. Le cinématographe tournait. A-t-il fixé ces larmes précieuses ?
Ces dernières semaines, j’ai vu souvent Jean Richepin. Il regardait avec une sincère admiration la jeunesse. Il suivait d'un regard indulgent ses joies chorégraphiques :
— Jadis, murmurait-il, nous dansions le quadrille : je triomphais dans la fantaisie du cavalier seul.
Il me semble revoir le bal de la Grenouillère, les canotiers, les belles filles qui tenaient le gouvernail, les danses folles de ces gaillards et de leurs solides compagnes. Nous sommes loin des pas américains, à l'apparente correction aux frôlements sournois. Nous sommes loin des silhouettes modernes. L’évocation du cancan laisse voir la mousse des dessous féminins, qui n'existent plus et qui déferlaient sur la jambe, comme l’écume des vagues sur le roc :
— J’attends mon vieux Ponchon, dit Richepin. Il sera au Val-André dans quelques jours. Il a dû se soigner, mais il est de nouveau solide. Il est prêt à prendre avec nous, avant chaque repas, la tomate.
C'est un mélange savoureux et puissant, qui donne un ton de rubis à une liqueur d’anis : il faut bien remplacer l’absinthe, qui fut chère à nos aînés. Richepin ! Ponchon ! Et comment ne point parler du troisième compagnon. Maurice Bouchor ? Comment ne pas appeler la beauté de ses Mystères, qui attirèrent Paris vers le petit théâtre de la galerie Vivienne ? Des pages exquises de Jules Lemaître conservent le souvenir de ces représentations. Les interprètes étaient de naïves marionnettes, à qui les trois poètes, — et quelques camarades. — prêtaient leurs voix. Et c’était d’une beauté primitive et religieuse !
— Il y a longtemps, longtemps, dit Richepin. Je dois fêter bientôt mon quatre-vingtième anniversaire. J'ai choisi cette date pour subir, en Sorbonne, les épreuves du doctorat. Je n’ai jamais eu le temps d'obtenir ce grade. Je le désire : c’est ma suprême ambition.
— Et le sujet de votre thèse ? — La chanson populaire de France. Il faudra ouvrir le grand amphithéâtre pour accueillir la foule, curieuse d’assister à cette soutenance :
— La sagesse, conclut Richepin, est de rester pendant toute sa vie un étudiant.
Il nous donne ainsi un beau précepte de modestie et nous livre un secret d’éternelle jeunesse.
Nozière
Septembre↑
R. de Givrey, « Au théâtre du
Nouvel-Ambigu. – La Glu,
pièce en 5 actes, de M. Jean Richepin, de l’Académie
Française », Le Soir,
9 septembre 1925, p. 3.
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M. Paston nous a donné hier, à l’Ambigu, La Glu, pièce que Jean Richepin tira de son roman et qui fut jouée il y a dix-sept ans sur cette même scène, où on vient de la reprendre. C’est l’avantage des bonnes pièces de rendre ces exhumations possibles. Il faut qu’une œuvre ait une valeur incontestable, que le style soit resté jeune pour pouvoir paraître devant le public sans porter une date au coin de ses phrases ou de ses situations. La Glu après dix-sept ans de sommeil dans les cartons a paru aussi vivante qu’au premier jour et c’est le plus grand éloge qu’on en puisse faire.
***
Qui ne connaît le roman de M. Jean Richepin. Les éditions populaires l’ont diffusé. Il a été dans toutes les mains, il est resté dans toutes les têtes. La Glu, c’est le modèle de la femme fatale, cruelle, sans cœur, sadique, méchante pour le plaisir d’être méchante, faisant le mal, pour la joie de faire le mal. Effrayé par sa mentalité, le docteur Cézambre l’a quittée après l’avoir épousée. Après une vie aventureuse, la Glu, qui gagna son surnom dans le monde de la noce, vient se reposer au Croisic.
Là, elle commencera, comme partout ailleurs, son œuvre de destruction. Elle attire chez elle, Marie-Pierre, le petit pêcheur de homards. Elle le gardera, malgré ses amis, malgré les pleurs de sa maman, malgré la douleur de sa fiancée, non par amour, mais pour affirmer son pouvoir dominateur, parce qu’elle est heureuse de voir souffrir. Et couronnant l’œuvre fatale qu’elle poursuit, Marie-Pierre, subjugué, lèvera la main sur sa mère... Toujours par distraction, La Glu séduira le comte de Kernan, son neveu, voire quelques paysans. Et un jour Marie-Pierre rencontrera le comte chez sa maîtresse. Fou de rage, en proie à une crise violente, l’explication menace de finir tragiquement, lorsque l’arrivée du docteur, reconnaissant sa femme dans La Glu, coupe court à cette scène.
Il ordonne à sa femme de partir, mais celle-ci, vient le braver jusque dans la maison où Marie-Pierre, blessé, repose. La mère de celui-ci, Marie-des-Anges, plutôt que de voir son « petit » retomber dans ses erreurs précédentes, dans ses souffrances, s’empare d’une hache et fracasse la tête de la femme fatale... et ô romantisme, aux gens assemblés, le docteur Cézambre explique comment il a dû supprimer sa femme, sa trop dangereuse femme.
Mlle Séphora Mossé a donné tout son charme et toute sa puissance dramatique au personnage de La Glu, qu’elle fatalise et auquel elle a donné plastiquement une physionomie inoubliable. Son talent fantasque, sa voix, son jeu, l’ont bien servie dans l’interprétation île ce rôle difficile et surtout antipathique.
Mlle Séphora Mossé, en jouant la pièce, songe tout le temps au roman et le vit pendant ces cinq actes assez habilement pour conserver au type qu’elle représente le geste brusque, la parole acide, le regard méchant et quelquefois — quand il le faut — faussement attendri. Remercions bien haut Mlle Séphora Mossé, nous lui devons une réelle émotion artistique.
A ses côtés Mlle Jeanine Zorelli est fort belle dans son rôle de mère. Par un miracle de talent et d’art, elle sait trouver des larmes et nous en fait verser. Elle a trouvé les accents justes qui partent du fond du cœur et qui montrent — avec quelle force 2 — l’âme d’une maman en détresse.
M. Hubert Preslier a composé supérieurement son personnage de Marie-Pierre, tour à tour câlin, farouche, passionné ou abattu. Il nous a montré une douleur poignante dans certains tableaux et a joué en excellent comédien.
Mlle Jacqueline Fernay prêtait sa douceur angélique au rôle de Naïk, Mlle Coquelet est une sémillante femme de chambre. Pourtant il y eut au cours de ses répliques quelques accrochages dangereux, qui doivent disparaître après quelques représentations.
M. Blondeau a campé une silhouette très digne du docteur Cézambre. M. Walter est cocasse dans le rôle de Gillioury, le vieux pêcheur. Signalons encore MM. Chanot, Gridoux et Béchet.
R. de Givrey.
Octobre↑
Henri Simoni, « Le Monument à
José-Maria de Heredia a été inauguré hier dans le Jardin du
Luxembourg », L’Œuvre, 18 octobre 1925, p. 2.
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La leçon de poésie dans un parc !...
Elle nous a été donnée hier, à l'occasion de l'inauguration du monument de José de Heredia, dans le jardin du Luxembourg tendu de moires vertes et casqué d'or, comme un personnage des Trophées.,
Sur une estrade drapée de bleu et dressée parmi les grands arbres, face au portique de marbre rose où s'encadre le buste de bronze du poète, Jean Richepin, président du comité, M. Joseph Bédier et M. de Molbac, tous trois en costume lauré d'académiciens, représentaient l'Académie Française. Autour d'eux, autour de Mme de Heredia et de sa famille, se pressait une foule de diplomates, d'hommes de lettres, de poètes et d'artistes : S. E. M. Gabriel de la Campa, ministre de Cuba à Paris ; le général Lasson, représentant le président de la République ; M. et Mme René Doumic ; Mme la duchesse de Rohan ; MM. Henri de Régnier, Sébastien-Charles Leconte, Georges Lecomte, Paul Valéry, Deschamps, Robert de Flers, Haraucourt, G. de Porto-Riche, les représentants des ambassades espagnole et sud-américaines, et la masse des amis inconnus qu'animait une ferveur égale.
Et la leçon commença. Ce fut d'abord Jean Richepin, qui, scandant de la main le rythme de ses phrases sonores, célébra en poète la gloire du poète. Il fut tendre, spirituel, ému et lyrique. A propos de Heredia, qui « est dans le bataillon sacré des auteurs classiques », il loua la poésie et les poètes, « si nécessaires dans la République » et, vibrant, disant et non lisant son discours, il clama et déclama un hymne à la Beauté et à celui-là qui en fit sa religion, à l'auteur des Trophées, cette Légende des Siècles, à la manière d'un Benvenuto Cellini qui sculptait « le combat des titans au pommeau d'une dague ».
Et Jean Richepin, qui parlait à des poètes, leur annonça triomphalement que la souscription en France et dans les pays de l'Amérique latine fut si généreuse qu'elle a couvert les frais de deux monuments celui-ci et sa réplique à Cuba — et qu'elle permet en outre d'instituer deux prix qui leur seront exclusivement réserves. Au nom de la poésie, en une péroraison d'une magnifique envolée, Jean Richepin salua « ce conquistador de la beauté par le verbe, José-Maria de Heredia » !
Puis M. Georges Lecomte, au nom de la Société des gens de lettres, et M. Sébastien-Charles Leconte, au nom des Poètes français, louèrent en langage harmonieux, le « Bois sacré », Heredia et son œuvre.
S. E. le ministre de Cuba, au fin profil de diplomate, sous la neige d'une chevelure ondulée, tint à apporter officiellement, au nom de la terre lointaine qui est fière d'avoir donné le jour à José-Maria de Heredia, l'e témoignage de son admiration pour le poète qui s'est donné à la France.
Le ministre de l'instruction publique <t des beaux-arts, étant empêché d'assister à cette noble cérémonie, avait prié M. Coville, son représentant, de lire le discours qu'il avait écrit. Et ce fut encore un délicat hommage à la poésie et à l'art.
Puis, de sa voix émouvante. Mme Segond-Weber lut quatre sonnets du poète cubain Armand Godoy, à la gloire du poète magnifique.
— HENRI SIMONI.
Décembre↑
Anonyme, « Littré vu par Jean
Richepin », L’Œuvre,
8 décembre 1925, p. 4.
André Billy signalait dernièrement l'admirable page de Jean Richepin, dans la Revue de France, sur Littré, membre de l'Assemblée Nationale, en 1871. Nous la reproduisons ci-dessous. Elle appartient vraisemblablement à la série de souvenirs : Toutes mes vies, dont le maître a déjà publié, au commencement de cette année, d'importants fragments. Il évoque, cette fois, ses débuts dans le journalisme, alors qu'en sa qualité de rédacteur parlementaire, à la Vérité de Portalis, il suivait les travaux de la chambre.
...Il m'était arrivé souvent d'arrêter mes yeux sur le grand savant qui siégeait là et qui, violemment pris à partie par les feuilles adverses, m'intéressait doublement, et beaucoup plus que bien d'autres de ses collègues.
Je ne tardai pas à remarquer qu'il ne perdait pas une minute, prenant constamment des notes, relevant seulement, de temps à autre, la tête pour écouter l'orateur à la tribune et, quand il était au fait de la question traitée — les plus complexes se débrouillaient vite à la lumière de cette intelligence — recommandant à griffonner sans relâche ses petits carrés de papier.
C'est grâce à cette méthode, qui a pour base fondamentale l'effort fragmentaire répété, — il y faut autrement d'énergie que pour donner un coup de collier par-ci par-là, — que, sans compter maints autres patients travaux de haute valeur, c'est grâce à cette application tenace de tous les instants qu'il a été permis à Littré d'élever, pierre sur pierre, à notre langue et à lui-même, ce monument unique qu'est le Dictionnaire qui porte son nom.
Ce portrait de Littré par Richepin est comme le commentaire saisissant de la phrase sur laquelle s'ouvre le tome troisième du célèbre Dictionnaire :
Celui qui veut faire un emploi sérieux de la vie doit toujours agir comme s'il avait à vivre longuement et se régler comme s'il lui fallait mourir prochainement.
Anonyme, « Autour du duel
Richepin-Brisson », Aux
écoutes, 27 décembre 1925, p. 6.
Ce document est extrait du
site RetroNews.
On s’est demandé comment un incident violent avait éclaté à propos d’une critique qui n’était que très désagréable. En réalité, cet incident ne fut qu’un épisode de l’inimitié, plus ou moins apparente, qui existe depuis très longtemps entre les Brisson-Montaigu et les Richepin-Capulet et qui remonte aux deux grand-pères des adversaires de l’autre matin : Jean Richepin et Francisque Sarcey qui eurent des démêlés retentissants. M. Jean Richepin empêcha M. Adolphe Brisson de faire partie de l’Académie Française...
La rencontre, dont les conditions étaient bénignes, se passa fort galamment sur la pelouse couverte de neige du vélodrome du Parc des Princes, où MM. J. Joseph-renaud et Gérard Bauer ne manquèrent pas de se citer le fameux duel dans la neige, si tragiquement raconté au chapitre trente-huit de Renée Maupurin. Les deux adversaires montrèrent une parfaite indifférence au danger, qui était réel, les armes ayant été bien chargées et la distance mesurée au double diamètre.
M. François Richepin s’abstint de tirer, mais sans la moindre forfanterie et sans que son attitude eût rien de blessant pour son adversaire.
Le directeur du combat déchargea le pistolet qui n’avait pas servi dans un panneau réclame placé à une soixantaine de mètres et où Ion entendit la balle claquer sec. Or, juste sous ce panneau se trouvaient, cachés derrière la palissade, deux ouvriers qui venaient d’assister, à la rencontre. Ils crurent qu’on lirait pour les punir de leur indiscrétion et prirent la fuite